Mackintosh Building - Glasgow

Visiter une ville c’est forcément entrer en contact avec ses fantômes, ses étoiles du passé. Sur tant de générations, tant d’enfants nés, tant d’étudiants, parfois, un génie émerge. C’est le cas de Charles Rennie Mackintosh, gamin de Glasgow, puis étudiant en art, puis… architecte et designer talentueux et visionnaire. Il est le créateur de plusieurs bâtiments à Glasgow, dont The Glasgow School of Art, et son mobilier est exposé à plusieurs endroits dans la ville. Si vous visitez l’Ecosse, cette visite est tout à fait d’actualité puisque c’est l’année de l’Innovation, de l’Architecture et du Design

Je ne connaissais pas Mackintosh avant de poser les pieds à Glasgow – ou si peu – et je suis d’ailleurs passée devant l’école d’art en allant déposer mon sac à dos à l’hôtel. Je me suis dit, sans savoir alors, « tiens, c’est marrant, ce bâtiment Art Nouveau qui fait face à un cube de verre ». Je ne savais pas, alors… Je ne savais pas que j’observais les deux parties de l’école : celle de Mackintosh, et le nouveau bâtiment. En 2014, un feu a ravagé l’oeuvre de l’architecte glaswégien (oui on a du vocabulaire, chez French Kilt) et est à présent inaccessible. La « nouvelle » école, déjà existante, a alors accueilli tous les étudiants. Après ce premier passage, je me renseigne et décide de faire la visite de l’école un peu plus tard dans la journée.

Mackintosh, un personnage touchant

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Quand j’ai vu son visage, Charles Mackintosh m’a semblé familier. Je n’ai toujours pas compris pourquoi. Mais il a ce regard malicieux, intelligent, cette moustache un peu franchouillarde, ces sourcils qui tombent. Il naît en juin 1868 et travaille, dans sa vingtaine, pour un cabinet d’architectes tout en prenant des cours du soir à l’école d’art de Glasgow. C’est là qu’il rencontre Margaret, qui deviendra sa femme, ainsi que la soeur et le compagnon de cette dernière. Tous les quatre deviendront des icônes de ce qu’on appellera ‘l’Ecole de Glasgow » ou « The Glasgow Style ». Alors que la tendance touche plus le continent, ils se documentent sur l’Art Nouveau et leur travail s’en ressent. Charles dessine, Margaret met les mains dans le cambouis. Ensemble, ils conçoivent des meubles magnifiques.
Charles et Margaret déménagent alors pour Londres, où ils essayent de percer sans trop de succès, puis s’en vont dans le sud de la France, où ils ne font que peindre des aquarelles. Charles mourra à Londres en 1928 d’un cancer de la gorge, suivi de peu par son épouse, malade du coeur.

The Glasgow School of Art, son premier grand projet

Ancien étudiant de l’école, Charles remporte en 1897 le concours de projets visant à construire le nouveau bâtiment de la Glasgow School of Arts. Avec ses symboles floraux, ses formes géométriques, son métal mêlé à la roche jaune de Glasgow, son projet séduit parce qu’il dénote vraiment avec ce qui se faisait à l’époque : du néo-classique, des colonnes grecques… Mackintosh dépensera quatre fois plus que le budget alloué mais ça en vaut la peine : le bâtiment est élégant, harmonieux, fonctionnel. Il rouvrira dans deux ans, dans sa version rénovée. Et ça promet d’être un grand moment d’émotion pour les étudiants…

Les étudiants de l’école organisent des visites guidées tout simplement passionnantes, même si l’on ne peut pas entrer dans l’ancienne école. Elles durent une heure et coûtent une dizaine de pounds. On en apprend beaucoup sur les symboles utilisés par Mackintosh, comme les roses, notamment. La bibliothèque, dont on ne peut qu’observer qu’une maquette, est passionnante : une ambiance japonaise, des lampes suspendues, des panneaux de bois, un mobilier sombre. Une ambiance zen pour étudier en paix. La visite se termine en beauté par la visite d’une petite pièce comprenant une sélection de meubles de Mackintosh, dont certains en collaboration avec son épouse. Du pur Made in Scotland !

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Courtesy of the Glasgow School of Art

Voici une photo de la bibliothèque, avant l’incendie…

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Courtesy of the Glasgow School of Art – GSA9©McAteer

Plus de photos sont disponibles sur le compte FlickR de l’école. J’adore l’album sur la bibliothèque !

Visiter la Mackintosh House

La visite de la Mackintosh House, sur le campus de West End, est un indispensable à celui qui, comme moi, se découvre une intérêt pour l’architecte. A environ une demi-heure de marche de l’école d’art, la maison en elle-même est en réalité une reconstruction. Le couple Mackintosh vivait sur Florentine Street, plus à l’ouest encore, mais la maison fut vendue puis rachetée par l’université. Le couple avait soigneusement prévu l’ameublement, et, par miracle, tous les meubles n’ont pas fini dans le salon privé d’un riche investisseur. L’université a alors organisé la « mise en scène » du mobilier.

Actuellement, la visite est gratuite, mais deviendra payante (5 pounds) le 18 mars 2016. Elle est obligatoirement guidée et dure une demi-heure. On entre alors dans l’univers intime du couple, dans une maison qui réunit tous les concepts développés par les deux artistes. C’est vraiment magnifique, harmonieux et poétique. Lorsqu’il recevait des commandes pour des meubles, Mackintosh en profitait souvent pour se faire faire un meuble similaire, pour son propre usage. Le salon, au rez-de-chaussée, est très sombre et on sent clairement une inspiration japonaise. A l’étage, le salon et la chambre sont d’une clarté divine, c’est vraiment magnifique. Le salon des Mackintosh fut l’un des premiers à revêtir… de la moquette ! Pas avant-gardiste dans tous les domaines, hein… J’ai vraiment adoré la chambre, si lumineuse et « peaceful ». Les photos sont interdites, ce sont donc les images rendues accessibles par le musée que vous voyez.

Certains meubles sont aussi visibles au rez-de-chaussée du Kelvingrove Museum, et d’ailleurs, c’est pas mal, ça permet de replacer les Mackintosh parmi tout ce qui se faisait dans le même genre, au début du XXe siècle en Ecosse…

(c) The Hunterian, University of Glasgow 2016

(c) The Hunterian, University of Glasgow 2016

Un thé à The Willow Tea Rooms

Dernière étape, la plus gourmande : The Willow Tea Rooms ! Mackintosh a collaboré avec Miss Cranston, une entrepreneure active à Glasgow, pour l’ouverture de plusieurs salons de thé mais en 1903, c’est dans celui-ci, sur Sauchiehall Street, qu’il s’investit le plus. Aujourd’hui, il est toujours possible d’y prendre un afternoon tea. Mais tous les meubles sont des répliques. Au vu du prix actuel de ses créations, on peut comprendre.

A l’intérieur, une drôle d’impression me prend. C’est à la fois tout à fait la patte Mackintosh, mais là, on a maintenant les meubles avec le bruit, les babillages les verres qui tintent. Nous avons la chance, pour notre afternoon tea, de nous asseoir dans la pièce du haut, qui était, dans le temps, la pièce un peu « luxe », qui donne sur la rue passante. Je ne m’étendrai pas sur l’afternoon tea, qui était bon mais pas non plus immanquable. J’ai malgré tout passé un bon moment, parfait pour finir ma petite virée à Glasgow…

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Ce qu’il reste à voir…

Ah si j’avais eu un jour de plus à Glasgow… Je l’aurais sans doute consacré à l’univers de Mackintosh. Le plus simple aurait sans doute été de jeter un oeil au Scotland Street Museum, une ancienne école conçue par Mackintosh. Aujourd’hui, c’est un musée consacré à l’univers de l’école. Surprise, c’est gratuit ! J’oubliais : j’ai vu The Lighthouse, la première création de Mackintosh, mais seulement de dehors… Alors qu’on a une vue super de la ville depuis l’intérieur. Dommage ! J’aurais pu aussi, par exemple, aller à « The House for an Art Lover« , au sud de Glasgow. Construite dans les années 90, elle suit les plans de Mackintosh à la lettre. Ca a vraiment l’air chouette… En allant hors de la ville, j’aurais aussi pu voir l’église Queen Church. Cela dit, ce qui est certain, c’est que j’irai visiter The Hill House dès qu’elle aura rouvert, aux beaux jours ! Cette maison, une commande privée, se trouve à 20 miles de Glasgow, on peut y aller à pied… Et il y a même un salon de thé sur place, du coup, c’est une bonne idée de visite à faire sur la journée.

Bref, ma découverte du monde de Charles Rennie Mackintosh est loin d’être finie. Et comme cette année est celle de l’innovation, de l’architecture et du design en Ecosse, ça ne m’étonnerait pas que des événements concernant l’architecte soient organisés. Ouvrons l’oreille ! J’encourage vivement les voyageurs de passage à Glasgow à s’intéresser au personnage en amont, ce ne sera que plus délicieux de découvrir son univers.

Découvrir l'oeuvre de Mackintosh à Glasgow


Et sinon, t’as piné ?

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