Le voyage en solo en Écosse, ça vous tente ? Charlotte est une lectrice de French Kilt. En 2022, elle s’est lancée dans un voyage en solo en Écosse. Elle prend la plume de French Kilt afin de nous raconter son aventure et de partager quelques conseils lumineux !

Il y a plusieurs façons de voyager et différents types de voyageurs.
Parmi la multitude de profils existants, on distingue souvent ceux qui n’aiment partir qu’à plusieurs, ceux qui au contraire se préfèrent explorateurs solitaires, ou encore ceux qui ont envie de voyager seuls sans jamais oser. Je faisais partie de cette dernière catégorie, avant que le Brexit ne me pousse enfin à tenter l’expérience du voyage en solo en Écosse, peu avant mes 32 printemps.

Comment je dois au Brexit mon premier voyage en solo en Écosse

J’ai visité pour la première fois l’Écosse en 2017 avec mon mari. Depuis, tombés amoureux du pays, nous y allons chaque année en janvier, seul moment où nous pouvons prendre des vacances ! Nous avons commencé par la majestueuse Édimbourg avant de sillonner la célèbre North Coast 500 lors de notre voyage de noces. De quoi donner un petit aperçu des beautés écossaises et une immense envie d’en voir plus…

Nous nous sommes ensuite aventurés sur l’archipel des Orcades, puis celui des Shetland, avant de traverser les sublimes Hébrides extérieures. Visiter l’Écosse à la basse saison, c’est composer avec des journées très courtes, et trouver de nombreux sites culturels fermés. Mais c’est aussi prendre son temps et profiter d’une tranquillité sans pareille.

Le passeport, un sésame pour se rendre en Écosse

En 2021, nous pensons faire une croix sur notre bulle d’air écossais, brusquement éclatée par la pandémie. Les restrictions sanitaires excluent tout voyage en janvier, mais par chance nous disposerons d’une semaine en octobre. Sans hésiter on prend deux billets en se languissant de fouler le sol écossais ! Mais rien ne se passe comme prévu…

A quelques jours du départ, nous apprenons l’obligation récente de posséder un passeport pour voyager au Royaume-Uni depuis la France. Cette mesure post Brexit est regrettable car mon mari, habitué à voyager avec sa carte d’identité, a un passeport périmé et il est trop tard pour le renouveler (musique dramatique)! On comprend qu’il ne pourra pas voyager, mais il m’est impensable de tout annuler tant je languissais. Après une journée de réflexion, c’est décidé : je pars seule !

Visiter les Highlands de l’ouest en transports en commun à la basse saison

J’ai très peu de temps pour repenser entièrement notre semaine prévue à deux dans l’Assynt en un voyage solitaire dont je ne connais pas encore la destination. Pour l’instant je ne suis sûre que de mon équipement : un grand sac à dos et deux paires de chaussures de marche imperméables. C’est déjà ça. Très organisée au quotidien, j’aime me laisser surprendre en voyage. Mais pour cette première expérience en solo, je préfère assurer un minimum de faisabilité. La voyageuse baroudeuse qui est peut-être en moi attendra un peu.

Peu à l’aise avec la conduite à gauche, j’annule sans regret la voiture de location. Ce voyage sera l’occasion de réaliser un autre rêve : parcourir une partie de l’Écosse en train. Ma nouvelle destination doit donc être accessible en train depuis Édimbourg en une seule journée. Je rêve de Highlands, de bord de mer et de randonnées… En jetant un œil sur VisitScotland, Walkhighlands et dans les guides tels qu’Évasion Écosse, je suis rapidement attirée par la West Highland Line. Classée parmi les plus beaux voyages ferroviaires du monde, cette ligne reliant Glasgow à Mallaig, sur la côte ouest, parcourt près de 180 miles à travers les sublimes paysages des Highlands.

Lochaber, une région parfaite pour un voyage en solo en Écosse

Desservie par la West Highland Line, la région de Lochaber semble satisfaire toutes mes envies d’évasion. Ce sera donc ma nouvelle destination ! Réputée pour ses sites naturels remarquables tels que le Ben Nevis ou la Vallée de Glen Coe, la région occupe également une place de choix dans l’histoire écossaise et son chapitre sur les mouvements jacobites.

Mallaig sera mon premier point de chute suivi d’Acharacle et de Kilchoan. Tous les trajets seront faisables en train et en bus, à condition de les prévoir du lundi au samedi et de bien caler les correspondances !
Seule inconnue avant de partir : je ne sais pas comment j’effectuerai le trajet en sens inverse, prévu d’une seule traite le dimanche, où AUCUN transport ne circule… voilà finalement un peu d’aventure !

La West Highland Line, un train écossais pas comme les autres

Je ne passe qu’une nuit à Edimbourg avant de rejoindre la gare de Glasgow Queen Street, point de départ de la West Highland Line. Les billets aller-retour coûtent moins de £75 sur le site ScotRail, incluant le trajet Edimbourg-Glasgow. Économique et écologique !
A cette période de l’année, deux trains par jour effectuent le trajet jusqu’à Mallaig. Il est ainsi nécessaire de bien caler la correspondance à Glasgow. Aussi, les wagons se séparent après Crianlarich : une partie prend les rails jusqu’à Oban et l’autre continue jusqu’à Mallaig. Les sièges étant attribués selon la destination choisie, les chances de se tromper sont minces. Et quand bien même, il y a tout le temps de changer car le train dessert plusieurs gares avant Crianlarich.

Du parc national du Loch Lomond et des Trossachs à Fort William, des paysages éblouissants

Pour occuper les 5h30 de trajet à venir, j’ai de la musique et de la lecture qui ne me seront finalement d’aucune utilité.Je passe la totalité du trajet le visage (masqué) collé à la fenêtre pour ne rien rater des paysages traversés et des éventuelles apparitions de faune sauvage.
Agréables jusqu’au nord du Loch Lomond & The Trossachs National park, les paysages deviennent spectaculaires après Upper Tyndrum. Le train suit alors les contours du relief et se fraye un chemin dans la vallée, dominée par de hauts sommets. Une nature majestueuse s’impose sous un ciel chargé, me laissant réellement bouche-bée !

Photo Charlotte Moullet.

Au cœur de cette immensité, chaque gare desservie paraît bien petite et reculée. Juste après avoir traversé la lande brute et désolée de Rannoch Moor, on atteint Corrour Station, l’une des gares les plus haut perchées du Royaume-Uni. Saviez-vous qu’elle a servi de lieu de tournage pour l’excellent Trainspotting ? (moi non plus.) Seuls les passagers du train, les marcheurs, ou les randonneurs lancés sur le West Highland Way peuvent y accéder. Je me sens donc assez privilégiée.

Un train peut en cacher un autre

Après Fort William, le wagon parcourt exactement le même trajet emprunté par le plus célèbre des trains à vapeur écossais : le Jacobite alias le Poudlard Express de Harry Potter. Fans du sorcier, cette dernière portion est faite pour vous car elle offre plusieurs sites emblématiques de la saga. Parmi eux le viaduc de Glenfinnan avec le loch Shiel en contrebas et, juste avant de quitter les berges du loch Eilt, ce superbe îlot recouvert de pins sylvestres, dont deux sont couchés, figurant la tombe de Dumbledore.

Une brume épaisse tombe sur les derniers miles et à 17h06 le train entre en gare de Mallaig.

Photo Charlotte Moullet.

Mallaig, bien plus qu’un terminus dans mon voyage en solo en Écosse

Plus qu’un terminus de ligne ou un simple embarcadère vers Skye et les Small Isles que l’on aperçoit au loin, Mallaig est le principal port de pêche de la côte ouest. En témoignent les nombreux bateaux amarrés dans lesquels les pêcheurs s’affairent. Attirés par les restes de pêche rejetés à la mer, plusieurs phoques nagent régulièrement dans ses eaux.

Le port de Mallaig. Photo Charlotte M.

Le port de Mallaig. Photo Charlotte Moullet.

Mallaig, un bon point de départ pour randonner

Le village propose deux randonnées accessibles depuis le centre : le Mallaig circuit (3 km) et le Loch an Nostarie circuit (6 km).

Le Loch an Nostarie circuit

Attirée par la promesse de beaux paysages, je choisis le second circuit annoncé plus complexe que le premier. Partie bien équipée (portable chargé, tenue imperméable et pique-nique), il faut moins de 10 minutes pour profiter d’une nature majestueuse et silencieuse. Il en faudra davantage pour atteindre le loch et terminer la boucle. Car le balisage n’est pas toujours évident, et Google maps a été d’une grande aide quand je faisais fausse route !

Le sol bien détrempé force à ralentir le rythme, tout comme le climat changeant. J’ai aussi pris tout le temps nécessaire pour admirer les panoramas sur le port de Mallaig en contrebas, sur les îles flottant au large, et sur le fameux Loch An Nostarie caché au loin. Je suis là pour ça. Au loin, j’entends les cerfs bramer sans les apercevoir. Je n’avais jamais entendu ce cri, plutôt intimidant… Après un long moment passé sur le plateau, je redescends vers le loch et termine la boucle sur un terrain plus plat et sec.
Je me languis déjà de la prochaine randonnée, prévue plus au sud à Acharacle.

Le Loch An Nostarie – Photo Charlotte Moullet.

La péninsule d’Ardnamurchan : « le promontoire des grandes mers »

Le village d’Acharacle

Situé tout à l’ouest du loch Shiel, Acharacle est un petit village marquant (pour certains) l’entrée dans la péninsule d’Ardnamurchan. Outre un hôtel, quelques commerces et un excellent café, Acharacle propose une jolie balade à pied d’environ 1h30 vers le Castle Tioram (prononcé Tchurum). En quittant le Loch Shiel Hotel, remontez l’A861 en direction de Lochailort et passez le pont surplombant la rivière Shiel. Continuez la route jusqu’au panneau indiquant Dorlin et tournez à gauche à l’intersection pour suivre la Dorlin Road jusqu’au bout.

Juste après avoir quitté l’A861, la Dorlin Road est plus étroite et sinueuse, traversant une forêt que l’on imagine facilement peuplée d’êtres imaginaires. Le chemin longe la rivière Shiel avant de s’enfoncer dans de hauts feuillages parsemés de quelques habitations.

Le Castle Tioram

Tout au bout de cette route, le Castle Tioram apparaît fièrement, perché sur son île accessible à marée basse. Bâti autour du 13e siècle, le château est fermé au public depuis la fin des années 90 et a vu une partie de ses murs s’effondrer. Tout autour, un site naturel exceptionnel, magnifié par les couleurs d’automne. Je repars à Acharacle par un chemin différent de l’aller. Celui-ci débute à l’embouchure de la rivière Shiel, qu’il ne cesse de longer avant de rejoindre la Dorlin road.

Le Castle Tioram

Le Castle Tioram – Photo Charlotte Moullet.

Kilchoan et le phare d’Ardnamurchan

A 22 miles de là, le village de Kilchoan occupe une place privilégiée en bord de mer.
L’unique route pour s’y rendre en voiture ou en bus depuis Acharacle offre des paysages grandioses. Attention aux estomacs sensibles (et même robustes) car elle ne cesse de monter, descendre et tourner pendant 45 minutes.

Depuis le centre de Kilchoan, un ferry permet de rejoindre Tobermory sur l’île de Mull en 35 minutes. Je profite d’ailleurs d’une vue panoramique sur l’île depuis ma chambre louée pour 2 jours. Un décor parfait pour reprendre les forces nécessaires à une dernière randonnée. Grande amatrice de phare, je décide d’aller voir celui de la pointe d’Ardnamurchan, érigé en 1849 avec du granit de Mull.
La balade comprend environ 14 miles aller/retour sur route goudronnée. Trop ambitieux sur une demi-journée, je ne ferai que le retour après avoir été emmenée en voiture au pied du phare, haut de 35 m.

A peine déposée, je suis immédiatement happée par la vue sur les îles posées au large et tente de repérer les cétacés qui peuplent ces eaux.

Vue depuis le phare d'Ardnamurchan

Vue depuis le phare d’Ardnamurchan – Photo Charlotte Moullet.

Le brame des cerfs… et un mouton à quatre cornes

En quittant le phare et sa boutique-café, j’entends rapidement un son familier : de nouveaux brames de cerfs que j’aperçois ENFIN au loin accompagnés de biches ! Les jumelles ne sont pas de trop pour profiter de ce fabuleux spectacle. En chemin, je croise également des phoques, des oiseaux et des moutons dont un spécimen à quatre cornes méconnu, le mouton de Jacob ! Une minuscule épicerie en bois se dresse à mi-parcours. On peut y acheter des œufs et des légumes frais cultivés dans le jardin attenant en déposant la monnaie demandée dans une boîte dédiée. Ce système met parfaitement en lumière l’honnêteté des âmes environnantes. La fin de la balade n’est pas aisée, marquée par la pluie et de belles montées. Après quelques heures de marche, je rentre fatiguée mais comblée. Je m’endors en pensant au défi que j’aurai à relever le lendemain : rejoindre Mallaig depuis Kilchoan sans aucun transport en commun.

Faire du stop dans les Highlands quand on voyage en solo en Écosse

Ce trajet qui aurait pu être compliqué sera finalement assez aisé grâce à la solidarité des habitants et à leur ouverture à l’autostop. Chose loin d’être évidente en pleine crise sanitaire, malgré le port du masque !

Une route, plusieurs covoitureurs…

En me proposant de m’emmener jusqu’à Acharacle où elle doit déjeuner avec une amie au Café Tioram, the place to be, mon hôte me permet d’effectuer la moitié du trajet. J’ai beaucoup rigolé en présence des deux amies, occupées à éplucher les ragots locaux !

Arrivée à Acharacle, je tente timidement mes premiers levers de pouce, sans franc succès. Et alors que je faisais une pause, un homme très âgé arrête spontanément son 4×4 pour me demander ma destination. Il me propose de l’attendre 20 minutes, le temps de finir ses obligations et de revenir me chercher pour m’avancer de quelques miles. Je n’en reviens pas et accepte avec plaisir ! Prénommé Duncan, ce monsieur est un ancien de la Royal Navy, la classe. Il réside à Kinlochmoidart où il me dépose devant son impressionnant manoir baronnial écossais entouré d’hectares de forêt.

Très vite l’un de ses employés propose de me rapprocher davantage. Muni de bottes et pêcheur de moules à ses heures perdues, Andrew, me confie avoir vécu plusieurs années à Fontainebleau ! Improbable dites-vous ? Il me laisse devant le pub de Glenuig, en prenant le temps de demander aux gens présents si quelqu’un va à Mallaig.
Pas de chance pour cette fois !

Quelque part entre Glenuig et Roshven

Quelque part entre Glenuig et Roshven- Photo Charlotte Moullet.

Une partie à pied avant d’atteindre Mallaig

Depuis Glenuig, je marche près de 2 miles jusqu’à Roshven où j’aperçois une voiture garée sur le côté. A l’intérieur, un papi en pleine lecture qui accepte volontiers d’interrompre sa pause pour me déposer à Lochailort d’où j’entends le Jacobite résonner. Deux amis d’enfance me permettront ensuite de rejoindre Mallaig et me font promettre de partager à un maximum de Français leur profond désaccord avec le Brexit qu’ils n’ont pas choisi, comme beaucoup d’Écossais…

Je passe ma dernière nuit écossaise à Mallaig et retrouve dès le lendemain à l’aube, la West Highland Line en direction de Glasgow. Je ne m’attarde ni à Glasgow ni à Edimbourg, mon avion décollant le jour même. C’est déjà nostalgique mais remplie de souvenirs que je m’envole pour Marseille.

Osez le voyage en solo en Écosse… même en automne !

Le Brexit aurait pu tout gâcher. Il m’a finalement permis de vivre l’expérience que je n’avais jamais osée. Pourquoi ? Spoiler alert : je n’avais jamais créé l’occasion. L’opportunité s’est en effet présentée soudainement. Je ne l’ai pas choisie mais j’ai décidé de la saisir. Car au fond, voyager accompagné(e) n’est pas une obligation, surtout si l’envie voire le besoin de partir explorer le monde en solo se fait sentir. C’est votre cas ? Alors, n’attendez pas ! Et si vous aimez l’aventure avec un minimum de logistique (les deux ne sont pas incompatibles) peut-être que le bon compromis pour un premier voyage en solo est de choisir une destination familière.

L’Écosse était l’environnement parfait pour moi : je connaissais en partie la destination, la langue et les habitants dont la gentillesse n’est plus à prouver. Il m’était possible de me débrouiller sur place où je me suis toujours sentie en sécurité, même en expérimentant le stop. Les personnes croisées en chemin m’ont toutes rassurée et confirmé l’absence de risque à m’y essayer. Je leur ai fait confiance, et elles avaient raison. Ce n’est peut-être pas le cas dans toutes les régions/pays.

La fierté d’avoir entrepris un voyage en solo en Écosse

Avec le recul, je ressens un immense BONHEUR d’avoir enfin osé, d’avoir vécu à fond ce voyage concentré sur ce que je considère essentiel : profiter d’une nature grandiose loin de la foule, explorer à pied et en transports en prenant réellement le temps, rencontrer les locaux et échanger avec eux…

Un habitant m’a d’ailleurs demandé « mais pourquoi faites-vous ça toute seule et à cette période de l’année ? » Et bien pour toutes ces raisons, et à cause des péripéties liées au Brexit.
Je n’aurai aucune hésitation à repartir pour un voyage en solo Écosse et plus longtemps dans ce si beau pays dont il reste tant à découvrir. Il est encore tôt pour tenter l’aventure solo à l’autre bout du globe, dans un pays inconnu et dont je ne parle pas la langue… mais qui sait, peut-être qu’un jour j’oserai.